Au seuil du XVIIe siècle, la poésie est encore largement inspirée par La Pléiade qu'avait brillamment illustré Ronsard : une poésie qui s'abandonne aux fastes de l'imaginaire et de la mythologie antique.
Les enthousiasmes de la Renaissance continuent à animer les cercles poétiques constitués autour du roi Henri IV ou de Marguerite de Valois.
Les grands poètes de cette époque s'appellent encore d'Aubigné (qui meut en 1630), Desportes (1546-1606) ou même Du Bartas (mort en 1590) qui connut une gloire européenne.
Avec la venue de Malherbe (1555-1628), la poésie se tourne vers une esthétique résolument moderne, qui annonce les exigences du classicisme (raison, clarté et naturel), mais le renouveau ne s'effectue pas du jour au lendemain.
Pendant les premières décennies du siècle (au moins jusqu'à 1630), les doctrines poétiques les plus variées coexistent.
Pour définir les deux tendances de cette inspiration poétique, on a inventé au XXe siècle la notion de baroque, par opposition au classicisme.
Le mot baroque vient du portugais barroco, ce qui signifie «perle irrégulière».
Le terme, d'abord utilisé en histoire de l'art, désignait le travail d'architectes, de peintres et de décorateurs qui, dans la mouvance de la Contre-Réforme, ont voulu créer un art théâtral, spectaculaire, fait de courbes et de formes instables.
Cette esthétique nouvelle, née en réaction à l'équilibre que la Renaissance avait héritée de l'Antiquité, inspira aussi des compositeurs qui, comme Monteverdi, désiraient que la musique soit plus libre, plus souple, de manière à ce qu'elle puisse mieux qu'avant imiter les sursauts de l'âme.
En poésie, notamment chez d'Aubigné, Tristan L'Hermite ou Vincent Voiture, le goût qu'avaient les architectes pour les façades courbes, donnant une impression d'instabilité, ce goût qu'avaient aussi les peintres pour le trompe-l'oeil, prend une allure plus grave où c'est la vie elle-même qui apparaît mouvante: l'amour est éphémère, le bonheur n'est rien d'autre qu'une illusion et l'existence devient une suite de métamorphoses où la réalité n'a désormais pas plus de poids qu'un souffle.
Les incertitudes et les angoisses religieuses ont, tout au long du XVIe siècle et pour une bonne part du XVIIe, ébranlé la civilisation européenne.
Dès lors, il n'y a pas lieu de se surprendre que la poésie ait gardé la trace de la précarité des choses.
Le baroque en poésie, toutefois, s'est aussi développé au sein de milieux mondains, ce que notamment les oeuvres de Desportes et d'Urfé, le créateur de l'Astrée, nous font voir.
Dans ces cas, l'inspiration est moins angoissée, plus artificielle aussi sans doute que chez d'Aubigné, mais l'art gagne alors de la virtuosité et une part ludique qui gagne à être appréciée.