La fréquentation des auteurs anciens à travers les manuscrits apportés en Italie par les Grecs développe dès le XVème siècle l'étude des humaniores litterae (ces lettres qui rendent plus humain) que les Romains opposaient aux diviniores litterae (lettres divines) : ces "lettres humaines", ou "humanités", longtemps mises sous le boisseau par l'Église, rassemblent les connaissances profanes dont l'homme est le centre.
« Faire ses humanités » signifiera longtemps étudier les auteurs grecs et latins et s'employer à les traduire et à les commenter.
Mais ce travail de traduction et d'exégèse qui, appliqué à l'Écriture sainte, fortifie l'évangélisme, ne pouvait manquer d'inspirer aussi tous les espoirs de progrès que devaient permettre l'esprit d'examen et l'expérimentation scientifique.
C'est ce deuxième sens que privilégiera le mot "humanisme", à partir du XIXème siècle, en faisant siens les mots de Protagoras : "L'homme est la mesure de toute chose".
Cette confiance exaltée dans les facultés humaines préfigure l'idéal des Lumières et lui survivra dans le scientisme, même si, déjà, la Renaissance, ensanglantée par les luttes religieuses, la met copieusement à mal.
C'est tout naturellement autour de l'éducation que se rejoignent d'abord les humanistes, soucieux de la débarrasser du psittacisme scolastique et de l'ouvrir aux nouvelles branches du savoir.
Avant les rationalistes et les encyclopédistes, les humanistes ont été soucieux de fonder le savoir sur l'expérimentation .
Avant les philosophes, les humanistes ont eu une vocation pour conseiller les Princes (Machiavel, Thomas More, Erasme).
La foi humaniste s'épanouit en dépit de l'héliocentrisme de Copernic, qui retire à l'homme son rang de créature élue dans l'univers.
Mais le déchaînement de la barbarie au Nouveau Monde et plus encore celle des guerres de religion ne manquent pas de la nuancer.
Montaigne, avant les autres, confie son scepticisme à l'égard de la raison humaine : « Est-il possible de rien imaginer d'aussi ridicule que cette misérable et chétive créature, qui n'est pas seulement maîtresse de soi, exposée aux offenses de toutes choses, se dise maîtresse et impératrice de l'univers, duquel il n'est pas en sa puissance de connaître la moindre partie, tant s'en faut de la commander ? »