Alfred Jarry est né à Laval (Mayenne, Pays de la Loire) en septembre 1873.
Des enfances à Laval, celui qui devait conclure à la portée métaphysique de la remémoration amoureuse a fait jaillir l'un des principaux ruisseaux où il ait bu.
Les eaux, les mares, les landes désigneront désormais la Bretagne où règnent les Vierges mères.
Ce sont elles qui guidaient les processions et les fêtes auxquelles Jarry ne cessera de faire des allusions de transparence variable.
À travers leurs gestes se manifeste le merveilleux de la vie, nulle part aussi clairement lisible que dans l'art populaire célébré par L'Ymagier (revue fondée en 1894) ou dans les œuvres d'Henri Rousseau que Jarry vantera le premier.
Pas une des héroïnes de Jarry qui ne réincarne les fées et ne ravive dans d'actuels enchantements l'ancien paradis.
Il entre en rhétorique à Rennes où réside sa famille.
Il étudie à Rennes, puis à Paris.
En 1891-1892, il est élève d’Henri Bergson et condisciple de Léon-Paul Fargue et d’Albert Thibaudet au lycée Henri-IV.
Il échoue trois fois au concours de l’École normale supérieure.
À partir de 1892, Alfred Jarry se lie avec l’équipe du Mercure de France (Alfred Vallette, Rémy de Gourmont) et fréquente Mallarmé ainsi que les milieux littéraires parisiens (Rachilde, Léon-Paul Fargue et Marcel Schwob).
Ubu roi est joué pour la première fois en public en décembre 1896 au Théâtre de l’Œuvre (Jarry y est alors le secrétaire du directeur, Lugné-Poe).
En 1898, il écrit Gestes et opinions du docteur Faustroll, pataphysicien (publication posthume en 1911).
Il meurt de la tuberculose, dans un grand dénuement, en 1907, à l’âge de trente-quatre ans.
Précurseur du surréalisme et du théâtre de l'absurde, Alfred Jarry crée le personnage d'Ubu, alors qu'il est encore lycéen à Rennes.
Inspiré par l'un de ses professeurs, cette figure phare de la pièce 'Ubu roi' et de ses suites 'Ubu enchaîné', 'Ubu cocu' etc. incarne la tyrannie poussée à son extrême bêtise.
Proche de Marcel Schwob, d'Alfred et de Rachilde Valette, le trublion originaire de Laval parvient à se faire un début de réputation dans les milieux artistiques parisiens.
Anarchiste convaincu, les oeuvres délirantes de Jarry ne manquent pas de faire scandale, notamment lors d'une représentation au Théâtre de l'Oeuvre en 1896.
L'écrivain, lecteur assidu de Rabelais, exerce des talents de poète symboliste avec des oeuvres comme 'César antéchrist', et de romancier avec 'Les Jours et les nuits' et 'Le Surmâle'.
Créateur de la 'pataphysique', science définie dans 'Gestes et opinions du docteur Faustroll, pataphysicien', Alfred Jarry entraîne dans son sillage de nombreux écrivains adeptes de la folie et de la dérision.
Les œuvres de Jarry sont des solutions parallèles du problème de physique que lui posaient, dès les origines, la dévotion à la Vierge et l'appétit martial du record.
Dans Les Minutes de sable mémorial (1894), livre d'apparence composite, l'évidente unité de moments évoqués en des formes très diverses vient de l'éclairage sinistre que jette sur tout spectacle la naissance des mondes quand l'auteur la reproduit en lui sous le regard intérieur.
Tout le cycle d'Ubu, qui se développe ensuite à travers César Antéchrist (1895), Ubu roi (1896), Ubu enchaîné (1899), Ubu cocu, et jusqu'en des textes où la verve humoristique rejoint le burlesque médiéval, procède de cette étonnante genèse au terme de laquelle, après avoir mitigé son délire de domination, Jarry se retrouve, non plus Dieu, ni Père Ubu, mais fils de Dieu, voué à « La Passion comme course de côte ».
D'abord, dans Les Jours et les Nuits, le règne de Jarry s'affermit avec celui du héros : Sengle, le solitaire au miroir, accorde à son double visible la splendeur parfaite requise en toute création. L'image de soi est seule digne d'amour, image accompagnée de tout le spectacle du monde,
Ubu est entré dans le ciel mythologique : ce qu'il y eut de prophétique dans les dits de ce maroufle, abondamment illustrés par les événements de ce temps, manifeste une nécessité historique dont Alfred Jarry s'est trouvé l'instrument privilégié.
Tandis que les créateurs d'emblèmes universels, Cervantès ou Goethe, s'abritaient dans les coulisses d'où ils manœuvraient don Quichotte ou Faust, l'écrivain français s'est appliqué à faire de tout un pan de sa vie une interprétation théâtrale du rôle d'Ubu, pour révéler en ce personnage l'instance centrale de l'esprit humain.
Affirmation dénuée d'humilité, sur laquelle s'articulent les thèmes très divers du poète, du dramaturge et du romancier.